Commémoration des dix ans de la pose d'une stèle en souvenir du Camp de Beyris © Mathieu Prat 

Cérémonie

Polo-Beyris : un camp qu'on n'oublie pas

Jeudi 7 décembre, des habitants, membres d'un Conseil de quartier, ont voulu se souvenir du camp du Polo. Avec le soutien des services de la Ville, ils ont organisé une commémoration.

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Lors de son mandat précédent (2021-2023), le Conseil de quartiers « À l’ouest de la Nive » avait travaillé sur le thème de la Seconde guerre mondiale. En collaboration avec les membres du Collectif pour la Mémoire du Camp de Beyris, invités à participer aux réunions de l’instance citoyenne, le Conseil a recentré son action autour d’un temps de commémoration du Camp du Polo. Avec le soutien de la Ville de Bayonne, il s'est investi dans l’organisation d’une commémoration qui se tiendra à la date anniversaire des 10 ans de la pose de la stèle dédiée à ce camp. Les enfants de l’école Jean-Moulin, sensibilisés à l’histoire du Camp grâce à l’intervention d’un membre du Collectif, ont été invités à prendre part à ce souvenir.

L'histoire

Au début du XXe siècle, le quartier Beyris disposait d'un terrain de polo qui s'étendait sur plus de huit hectares. En 1937, le propriétaire du site, Etienne Balsan, revend le domaine du Polo à la Ville de Bayonne. La municipalité de l’époque envisage d’y construire un lycée de jeunes filles et d’y aménager un terrain de sport. Mais entre 1939 et 1947, il devient un lieu d'enfermement où se succèdent des prisonniers et réfugiés. La Ville de Bayonne va mettre des années à pouvoir récupérer le terrain. Ce n'est qu'à la fin des années cinquante que commence la construction de logements collectifs et pavillons individuels sur le vaste plateau.

Le Collectif pour la Mémoire du Camp de Beyris, groupe de volontaires et de représentants d’associations (Ligue des Droits de l’Homme, Comité pour la Défense des Droits de l’Homme en Pays Basque, Souvenir Français, Amicale des Guerilleros en France...), se lance début 2012 dans des recherches et recueille une vingtaine de témoignages sur l’histoire de ce camp où se succédèrent de 1939 à 1947 des milliers de prisonniers. Ils sont aidés par l’ONAC et l’UDAC.

À l’initiative du collectif et avec le soutien de la Ville de Bayonne, une borne dite des 4 camps a été érigée en 2013 à l’emplacement du camp, au cœur du quartier du Polo-Beyris. Sculptée sur pierre par l’artiste Régis Pochelu, cette borne témoigne de l’histoire du site et invite à la construction d’un monde plus juste. Dans la continuité et à l’initiative des membres du Conseils de quartiers « À l’ouest de la Nive », la Ville de Bayonne en lien avec l’école Jean-Moulin et les différents acteurs, organisent une cérémonie de commémoration.

1939 - Le centre d’hébergement du Polo 

Début 1939, la chute de Barcelone entraîne la fuite d'un demi-million de Républicains espagnols qui tentent de trouver refuge en France. C'est la Retirada. Mais la France est alors peu encline à accueillir des étrangers sur son sol. Les hommes sont parqués dans des camps ; les femmes, enfants et vieillards sont envoyés et dispersés dans toute la France.

À Bayonne les écuries du Polo sont réquisitionnées pour y entasser des centaines de ces réfugiés, couchés à même la paille, sans possibilité de sortir de l'enceinte. Fin septembre 1939 le «  Centre d'hébergement du Polo  » est fermé, les 260 femmes et enfants qui s'y trouvaient encore sont ramenés de force à la frontière espagnole.

1940 – 1944 Le Fronstalag 222 

La Seconde Guerre Mondiale éclate. Après la défaite de mai-juin 1940 un million et demi de soldats français sont faits prisonniers, dont 80 000 soldats provenant de l'empire colonial (Maghreb, Afrique, Indochine, Antilles, Madagascar...), et emmenés en Allemagne, répartis dans des stalags. Très vite, les autorités nazies décident de renvoyer les prisonniers coloniaux en France où sont construits en hâte des «  frontstalags  » dans toute la zone occupée. À Bayonne, le domaine du Polo est réquisitionné par les Allemands à l'automne 1940 et une cinquantaine de grandes baraques en bois sont rapidement édifiées, entourées de 3 rangées de barbelés et 5 miradors. Ce sera le Frontstalag 222 dont dépendront des milliers de prisonniers jusqu'au départ des Allemands le 23 août 1944.

1944 - Le camp de concentration du Polo 

Juste après la Libération, des centaines de présumés collaborateurs et trafiquants de marché noir sont arrêtés, et emmenés à la Maison-Blanche de Biarritz, au Château-Neuf ou à la maison d’arrêt de Bayonne. Puis transférés au «  Camp de concentration du Polo »qui ouvre le 18 septembre 1944, et gardés par des FFI. Près de 800 personnes (habitants de la région de Bayonne en majorité) vont passer par ce camp qui servait à la fois de camp d'internement et de centre de triage en attendant un transfert devant l'autorité judiciaire, une assignation à résidence, ou un internement à Gurs (pour 259 d'entre eux). Les derniers détenus politiques et administratifs, comme on les désignait alors, sont transférés à Gurs le 20 avril 1945.

1944-1947 - Le dépôt 189 

Dès fin 1944 la partie nord du camp était réservée aux prisonniers de guerre allemands. À partir du 20 avril 1945, tous les prisonniers de guerre de Gurs sont transférés au camp du Polo qui va désormais s'appeler «  dépôt 189  » et dépendre de la XVIIIe région militaire. Des milliers de prisonniers allemands vont passer par ce camp, répartis à leur tour dans des camps annexes et commandos. Beaucoup de ces prisonniers vont être affectés au déminage de la côte et au nettoyage du littoral encombré d'obstacles anti-débarquement. Le  dépôt 189  ne fermera que fin 1947.